A l’heure où dans certaines régions du monde les femmes sont emmurées vivantes, interdites d’entendre la voix d’une autre donc de communiquer (le suicide de femmes explose en Afghanistan), le corps et son langage parfois bruyant (re)prennent leur place dans nos cabinets de thérapie. Alors honorons cette avancée, faisons-en bon usage.
Il n’y a pas si longtemps, chez nous aussi, le corps était caché, maîtrisé, traité comme un esclave, un animal à dresser. Le prix à payer était la dissociation sévère, comme les premiers cliniciens du début du XXe siècle l’ont observé avec l’hystérie féminine ou les poilus rentrant du front perdus à jamais dans leurs paralysies et autres conversions impressionnantes.
« Cachez ce corps que je ne saurai voir », un héritage historique particulièrement lourd dans nos professions de soignants et d’accompagnants. Je me souviens de mes années universitaires en psychologie. Hormis quelques lignes sur Reich et Janov, que nous a-t-on appris de la nécessaire écoute du corps et des méthodes pour y parvenir ?… Jusqu’à récemment, l’accès à l’inconscient fut envisagé uniquement par l’hypnose classique, l’association verbale libre et l’analyse psychanalytique des rêves.
Seulement le corps a tant à nous dire.
Il crie son impatience à être vu et entendu. Sa rage même parfois, sous des symptômes dissociatifs hurlant le désespoir et la solitude de nos profondeurs.
Les outils psychocorporels comme l’EFT ou l’EMDR sont des voies de dialogue qui révolutionnent les prises en charge. Ils sont de plus en plus connus et reconnus dans les services de soin institutionnels, en psychiatrie par exemple. Personnellement je l’observe par les demandes que je reçois pour former des équipes en EFT. Ça bouge concrètement. Magnifique !
Plus réjouissant encore est l’engouement récent pour le travail des profondeurs avec les états de conscience élargie permis par des techniques comme la RH (respiration holotropique) ou les TAP (thérapies assistées par psychédéliques). Utiliser la transe pour plonger et guérir est retrouver l’intelligence innée du « guérisseur intérieur » (Grof), que nous avons tous en nous. C’est aussi renouer et pacifier avec notre nature animale et nos besoins primaires d’expression corporelle et de contact charnel.
Contact avec son propre corps, bougeant, tétanisant, criant, dansant, exprimant toutes les nuances de sa musique unique et précieuse. Mais aussi contact avec l’autre, avec cet autre, thérapeute ou camarade pèlerin, et retrouver ainsi la joie de l’enfant, pour qui le lien avec l’extérieur ne passe que par les sens et le toucher en particulier.
Et quid de notre propre corps de soignant dans ce travail d’accompagnement ?
Il est souvent la caisse de résonance des processus du patient, à son service. Alors prenons-en soin, afin qu’il soit ouvert et réceptif, le plus libéré possible de nos entraves névrotiques personnelles. Descendons nous-mêmes dans ces espaces, osons les explorations, soyons à la fois courageux et enthousiastes. Et entrons dans la danse…
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