Chers collègues soignants, en ces temps où les tempêtes intérieure et extérieure se lèvent, il est essentiel de revenir aux fondamentaux et notamment à notre base de sécurité.
Dans le champ de l’attachement, le parent sécurisant est le havre et le socle de sécurité pour son enfant qui peut ainsi se réfugier auprès de cette figure d’attachement réconfortante et soutenante. Ces principes ancrés dans notre biologie et au service de notre survie se retrouvent à tout âge en situation de stress. Dans une relation soignante ou d’accompagnement, la personne en détresse se tourne vers un autre, « plus fort et plus sage » (Bowlby), pour déposer ses tourments et repartir plus sereine avec un sentiment de sécurité accru.
Plus que jamais nous devons, en tant que professionnels de la relation d’aide, à la fois prendre soin de notre propre sentiment de sécurité mais aussi prendre soin de celui des autres. La priorité est dans le premier point : d’abord veiller à notre propre axe, à notre propre ancrage. Sans cela la deuxième mission ne pourra pas se faire. Un bateau sans capitaine aux commandes ne va nulle part.
Prendre soin de soi… une expression un peu bateau justement qu’on nous rabâche beaucoup, surtout en ce moment (« et surtout prenez soin de vous ! ») et qui peut perdre de son sens à être ainsi galvaudé. Et pourtant ! Personnellement nous voyons dans notre entourage de psychologues, thérapeutes et autres soignants beaucoup trop de personnes « sur la ligne » au bord de l’implosion/explosion. On parle à juste titre du personnel hospitalier mais les libéraux ne sont pas épargnés non plus.
Au-delà des conseils classiques, de bon sens, dont le maître-mot est équilibre (perso/pro, corps/esprit, bon dodo, bon miam…), je souhaite souligner la nécessité de veiller à (re)trouver et solidifier notre axe et notre conscience à l’instant présent quand nous accompagnons quelqu’un. Pourquoi est-ce si important ? Lorsque nous sommes dans l’instant, connectés à ce qu’il se passe en soi et en l’autre, là vraiment là, le mental et ses peurs énergivores se calment et notre énergie est ainsi préservée. Nous ne luttons plus, nous sommes portés par l’énergie en présence, nous sommes dans le « flow » (Csikszentmihalyi). C’est probablement le meilleur moyen de prendre soin de soi à court terme et au long cours.
Concrètement cette attention à son axe et à l’instant passe par de petits et grands détails : la respiration, le retour aux sensations et au corps, les techniques psychocorporelles, le fait de ralentir nos paroles, le partage de regard, le toucher qui ancre… Cette manière de travailler (et d’être) est un rempart contre l’épuisement mental et physique car nous sommes alors vigilants également à nos propres besoins de soignant et nous pouvons ainsi y répondre. Sans compter que la transmission et les conseils passent bien plus puissamment par la modélisation, par l’exemple. A thérapeute cohérent et aligné dans ses paroles et actions, patient cohérent et aligné !
En janvier 2020, je nous souhaitais une « Nuit noire de l’Ame planétaire ». Il semblerait que nous nous en rapprochons. Rappelons-nous que tout changement profond et pérenne vers un présent plus juste passe par l’obscurité et une certaine dose de douleurs, que ce soit sur un plan individuel ou collectif. Cultivons donc la force de l’espoir et de la joie. Elle se trouve dans des menus détails, ouvrons les yeux.
Avec amour pour notre humanité en transition,
Gwenaelle